17 ème épisode :
A l’avant de l’avion, les passagers provenant de la cabine devaient escalader l’amoncellement de bagages pour atteindre la porte.
Roland prit par le bras la première personne qui se présenta et lui demanda de se glisser dans l’ouverture puis de se laisser tomber dans l’eau. L’homme hésita, car il fallait se pencher puis s’allonger pour enjamber la porte qui n’était que partiellement ouverte tout en affrontant la tempête qui mitraillait de sa furie l’espace entrouvert, l’arrosant de grosse gouttes de pluie mélangées à des gerbes d’eau de mer. Une fois l’obstacle franchit dans une position inélégante, ce serait la chute à l’extérieur, dans le lagon que la nuit et la tempête ne permettait pas de voir.
Les consignes que lui avait donné l’hôtesse lui revinrent en mémoire.
« S’il le faut, utilisez la force, poussez sans ménagement ceux qui hésitent ».
Sans plus hésiter il saisit de sa main libre la chemise du passager et le contraignit à se pencher sur la porte, le poussant sans ménagement. Par un réflexe idiot, le passager voulut se raccrocher au chambranle. d’un geste vif Rolland lui saisit le poignet et le fit basculer à l’extérieur.
Aussitôt fait il se retourna pour attraper le passager suivant à qui il fit subir le même traitement.
Ainsi, il agrippait les passagers pour les jeter à l’eau et son geste devenait de plus en plus naturel et efficace au fur et à mesure que femmes et hommes se présentaient devant lui. Il nota au passage des visages ensanglantés, des passagers titubant, raidis par la douleur, certains s’entraidant, les plus valides aidant les plus amochés. Les bagages amoncelés étaient un filtre qui ralentissait l’évacuation. « Fort heureusement, nota Roland, ils sont blessés à la tête ou au cou, ce qui ne les empêche pas d’évacuer… »
Malgré tout, le rythme était lent, car il fallait aider la personne à se hisser sur la porte à peine entr’ouverte, à s’allonger, puis la pousser sans ménagement pour la faire basculer à l’extérieur. le bruit du vent était tel qu’il n’entendait pas le bruit de la chute. Il faut dire que l’avion étant à présent bien enfoncé le plongeon n’était qu’un affaissement de quelques dizaines de centimètres.
Roland prit un instant pour regarder au-dehors. Dans la pénombre, il voyait les gilets jaunes disparaître rapidement dans la nuit et la pluie, poussés par le vent, s’éparpillant au hasard de la tempête.
En se penchant pour prendre un meilleur appui, il constata que l’eau lui arrivait à présent aux genoux : l’avion coulait.
Après s’être dégagée madame Tautura remarqua que plusieurs passagers étaient groupés vers l’avant de la cabine et les autres carrément entassés à l’arrière. Elle allait faire comme eux et s’apprêtait à se joindre à la file lorsque son regard fut attiré par un mouvement.
Sur un siège proche, un jeune garçon se tordait le coup pour observer la scène. Il essuya d’un revers de main un filet de sang qui zébra sa joue. Une affichette pendait sur sa poitrine, en partie masquée par le gilet de sauvetage, badge que madame Tautura reconnut et en déduisit que cet enfant voyageait seul. Elle lui tendit la main :
- Viens avec moi, souria-t-elle, nous allons quitter l’avion !
Le garçonnet se glissa auprès d’elle et madame Tautura lui prit la main.
- Comment t’appelles-tu ?
- Augustin.
Madame Tautura se pencha et murmura à son oreille :
- C’est un joli prénom.
En se redressant elle ajouta :
- Tu voyages tout seul, comme un grand ?
- L’hôtesse avait dit à un monsieur de s’occuper de moi, mais il était blessé et il m’a oublié …
- Tu sais qu’il ne faut pas gonfler nos gilets tant que nous sommes dans l’avion. Tu sais nager ?
- Oui, très bien, affirma son protégé en hochant la tête avec assurance.
Serrant fermement la main d’Augustin, madame Tautura reprit sa place en dernière position du groupe qui s’agglutinait à l’arrière de la cabine du Fairchild.
Le jeune garçon tira sur sa main pour attirer son attention et désigna ses jambes à-moitié immergées :
- Il y a beaucoup d’eau dans l’avion … laissant sa phrase en suspens.
- Ce n’est pas grave, répondit madame Tautura d’un ton rassurant, certitude qu’elle était loin d’éprouver. Nous allons bientôt sortir.
- Alors pourquoi on avance pas ?…
Jetant un regard circulaire, Madame Tautura vit qu’un passager venait de sortir par un hublot tandis qu’un autre se penchait pour enjamber à son tour l’étroit passage. Deux autres personnes attendaient leur tour.
- Viens, intima-t-elle à Augustin, nous allons passer par le hublot, il y a moins de monde.
A l’arrière de l’avion, dans les toilettes étroites, l’hôtesse se recula et prenant un nouveau passager le poussa vers l’ouverture. L’homme enjamba le bas de la porte et sans prendre garde aux hurlements du vent bascula et se laissa tomber dans l’eau noire.
L’hôtesse ordonna aux passagers suivants de sauter à l’eau, leur rappelant au passage de n’ouvrir leur gilet qu’une fois à l’extérieur de l’avion. Puis elle s‘adressa à Christian:
- Continuez à les faire évacuer, je suis inquiète de ne pas voir le copilote. Il aurait dû venir nous aider à l’arrière … je vais essayer d’appeler le cockpit !
Dans le poste de pilotage, le copilote parlait avec le commandant de bord, accroupi, de l’eau jusqu’à la taille.
- L’avion s’enfonce … il coule lentement … constata-t-il avec un regard inquiet tout autour de lui.
Pierre prit un masque à oxygène qu'il observa en le tournant dans sa main.
- Qu’est-ce qu’on pourrait faire avec nos masques à oxygène … il n’y a aucune étanchéité, ils ne sont pas fait pour cet usage, l’eau va entrer de partout.
Il avait repris conscience et se sentait vaseux, comme détaché des évènements qui se déroulaient autour de lui. Sa plaie au cuir chevelu ne saignait plus.
Régis réfléchit une seconde avant de donner son opinion :
- Si nous coulons il faudra attendre que l’au ait complètement envahi le cockpit, prendre notre respiration et tenter d’ouvrir ma fenêtre latérale. Une fois ouverte, si on n’est pas noyé il faudra sortir l’un après l’autre…
Pierre hocha la tête.
- Tu sortiras en premier, tu es mieux placé. Mais nous essaierons de respirer un peu d'oxygène avec nos masques, on ne sait jamais ...
Un bruit métallique, répété, sec mais assourdi attira l’attention du copilote. Il s’appliqua à en repérer la provenance et son regard se posa sur sa fenêtre latérale. Il eut un sursaut et cru voir une vision de cauchemar, un monstre marin était de l’autre côté de la vitre. Ses yeux s’écarquillèrent à la vision certes floue mais horrible de la créature qui s’approcha jusqu’à se coller contre la fenêtre.
à suivre ... (peut-être un court épisode pour Noël ?...)
A l’avant de l’avion, les passagers provenant de la cabine devaient escalader l’amoncellement de bagages pour atteindre la porte.
Roland prit par le bras la première personne qui se présenta et lui demanda de se glisser dans l’ouverture puis de se laisser tomber dans l’eau. L’homme hésita, car il fallait se pencher puis s’allonger pour enjamber la porte qui n’était que partiellement ouverte tout en affrontant la tempête qui mitraillait de sa furie l’espace entrouvert, l’arrosant de grosse gouttes de pluie mélangées à des gerbes d’eau de mer. Une fois l’obstacle franchit dans une position inélégante, ce serait la chute à l’extérieur, dans le lagon que la nuit et la tempête ne permettait pas de voir.
Les consignes que lui avait donné l’hôtesse lui revinrent en mémoire.
« S’il le faut, utilisez la force, poussez sans ménagement ceux qui hésitent ».
Sans plus hésiter il saisit de sa main libre la chemise du passager et le contraignit à se pencher sur la porte, le poussant sans ménagement. Par un réflexe idiot, le passager voulut se raccrocher au chambranle. d’un geste vif Rolland lui saisit le poignet et le fit basculer à l’extérieur.
Aussitôt fait il se retourna pour attraper le passager suivant à qui il fit subir le même traitement.
Ainsi, il agrippait les passagers pour les jeter à l’eau et son geste devenait de plus en plus naturel et efficace au fur et à mesure que femmes et hommes se présentaient devant lui. Il nota au passage des visages ensanglantés, des passagers titubant, raidis par la douleur, certains s’entraidant, les plus valides aidant les plus amochés. Les bagages amoncelés étaient un filtre qui ralentissait l’évacuation. « Fort heureusement, nota Roland, ils sont blessés à la tête ou au cou, ce qui ne les empêche pas d’évacuer… »
Malgré tout, le rythme était lent, car il fallait aider la personne à se hisser sur la porte à peine entr’ouverte, à s’allonger, puis la pousser sans ménagement pour la faire basculer à l’extérieur. le bruit du vent était tel qu’il n’entendait pas le bruit de la chute. Il faut dire que l’avion étant à présent bien enfoncé le plongeon n’était qu’un affaissement de quelques dizaines de centimètres.
Roland prit un instant pour regarder au-dehors. Dans la pénombre, il voyait les gilets jaunes disparaître rapidement dans la nuit et la pluie, poussés par le vent, s’éparpillant au hasard de la tempête.
En se penchant pour prendre un meilleur appui, il constata que l’eau lui arrivait à présent aux genoux : l’avion coulait.
Après s’être dégagée madame Tautura remarqua que plusieurs passagers étaient groupés vers l’avant de la cabine et les autres carrément entassés à l’arrière. Elle allait faire comme eux et s’apprêtait à se joindre à la file lorsque son regard fut attiré par un mouvement.
Sur un siège proche, un jeune garçon se tordait le coup pour observer la scène. Il essuya d’un revers de main un filet de sang qui zébra sa joue. Une affichette pendait sur sa poitrine, en partie masquée par le gilet de sauvetage, badge que madame Tautura reconnut et en déduisit que cet enfant voyageait seul. Elle lui tendit la main :
- Viens avec moi, souria-t-elle, nous allons quitter l’avion !
Le garçonnet se glissa auprès d’elle et madame Tautura lui prit la main.
- Comment t’appelles-tu ?
- Augustin.
Madame Tautura se pencha et murmura à son oreille :
- C’est un joli prénom.
En se redressant elle ajouta :
- Tu voyages tout seul, comme un grand ?
- L’hôtesse avait dit à un monsieur de s’occuper de moi, mais il était blessé et il m’a oublié …
- Tu sais qu’il ne faut pas gonfler nos gilets tant que nous sommes dans l’avion. Tu sais nager ?
- Oui, très bien, affirma son protégé en hochant la tête avec assurance.
Serrant fermement la main d’Augustin, madame Tautura reprit sa place en dernière position du groupe qui s’agglutinait à l’arrière de la cabine du Fairchild.
Le jeune garçon tira sur sa main pour attirer son attention et désigna ses jambes à-moitié immergées :
- Il y a beaucoup d’eau dans l’avion … laissant sa phrase en suspens.
- Ce n’est pas grave, répondit madame Tautura d’un ton rassurant, certitude qu’elle était loin d’éprouver. Nous allons bientôt sortir.
- Alors pourquoi on avance pas ?…
Jetant un regard circulaire, Madame Tautura vit qu’un passager venait de sortir par un hublot tandis qu’un autre se penchait pour enjamber à son tour l’étroit passage. Deux autres personnes attendaient leur tour.
- Viens, intima-t-elle à Augustin, nous allons passer par le hublot, il y a moins de monde.
A l’arrière de l’avion, dans les toilettes étroites, l’hôtesse se recula et prenant un nouveau passager le poussa vers l’ouverture. L’homme enjamba le bas de la porte et sans prendre garde aux hurlements du vent bascula et se laissa tomber dans l’eau noire.
L’hôtesse ordonna aux passagers suivants de sauter à l’eau, leur rappelant au passage de n’ouvrir leur gilet qu’une fois à l’extérieur de l’avion. Puis elle s‘adressa à Christian:
- Continuez à les faire évacuer, je suis inquiète de ne pas voir le copilote. Il aurait dû venir nous aider à l’arrière … je vais essayer d’appeler le cockpit !
Dans le poste de pilotage, le copilote parlait avec le commandant de bord, accroupi, de l’eau jusqu’à la taille.
- L’avion s’enfonce … il coule lentement … constata-t-il avec un regard inquiet tout autour de lui.
Pierre prit un masque à oxygène qu'il observa en le tournant dans sa main.
- Qu’est-ce qu’on pourrait faire avec nos masques à oxygène … il n’y a aucune étanchéité, ils ne sont pas fait pour cet usage, l’eau va entrer de partout.
Il avait repris conscience et se sentait vaseux, comme détaché des évènements qui se déroulaient autour de lui. Sa plaie au cuir chevelu ne saignait plus.
Régis réfléchit une seconde avant de donner son opinion :
- Si nous coulons il faudra attendre que l’au ait complètement envahi le cockpit, prendre notre respiration et tenter d’ouvrir ma fenêtre latérale. Une fois ouverte, si on n’est pas noyé il faudra sortir l’un après l’autre…
Pierre hocha la tête.
- Tu sortiras en premier, tu es mieux placé. Mais nous essaierons de respirer un peu d'oxygène avec nos masques, on ne sait jamais ...
Un bruit métallique, répété, sec mais assourdi attira l’attention du copilote. Il s’appliqua à en repérer la provenance et son regard se posa sur sa fenêtre latérale. Il eut un sursaut et cru voir une vision de cauchemar, un monstre marin était de l’autre côté de la vitre. Ses yeux s’écarquillèrent à la vision certes floue mais horrible de la créature qui s’approcha jusqu’à se coller contre la fenêtre.
à suivre ... (peut-être un court épisode pour Noël ?...)