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Incident sérieux et intéressant sous plusieurs aspects: gestion d'un vol + approches GNSS, mais quand le sol bouge...airmanship etc.
Le Royal New Zealand Air Force (RNZAF) "40 Sqdn." exploite le 757 et Lockheed C-130 Hercules depuis sa base d’ Auckland, proposant des vols réguliers entre Christchurch et la station de recherche McMurdo en Antarctique dans le cadre d'un pool logistique commun avec les États-Unis depuis 1965.
Le B 757 a rejoint la flotte en 2010. Alors que le C-130 dispose de plusieurs options d'atterrissage à McMurdo, certaines nécessitant des skis, le 757 à ce moment de la saison est limité à des opérations vers Pegasus Field avec sa seule piste sur glace de 3000m X 150 m. Le vol de l'incident était le deuxième de trois vols réguliers pour le début de la saison d'été à McMurdo, avec trois autres vols prévus à la fin de la saison en Février et Mars.
En raison de la longueur du vol environ 4 h 45 min, il faut calculer deux points de non retour avec un scénario critique où l'avion avec ses deux moteurs doit voler bas en raison d’un problème de pressurisation (PSR-2d), et un scénario moins critique avec les deux moteurs en altitude (PSR-altitude).
L'équipage, un captain instructeur, un captain en formation, un co-pilote et un captain en second, ont décidé d'utiliser le scénario critique PSR-2d plus conservateur, qui est à 2 h 47 min de vol. La météo étant un point clé dans la décision de l'équipage qui reçoit en temps réel des prévisions météorologiques par liaison satellite fournies par le Space US Navy et le Bureau Naval Warfare Systems Command des programmes polaires (SOPP) basés à Charleston, Caroline du Sud, et au McMurdo (SOPP)
Le vol avait déjà été retardé de deux jours par le mauvais temps, et un briefing à 07h00 le 7 octobre a indiqué "la présence de brume avec quelques nuages sur le terrain", mais avec une prévision d’amélioration dans la matinée. L'avion ne pouvant embarquer le carburant nécessaire au vol aller retour retour, il lui faut refueler à Pegasus Field.
Après plusieurs briefing météo, l'avion décolle finalement à 09h57 de Christchurch et approchant de PSR-2d, l'équipage devient de plus en plus préoccupé par le brouillard dans les environs de Pegasus sur la base des prévisions météorologiques actualisées. Toutefois, le SOPP indique aux pilotes que le brouillard était éloigné puis qu’il était sur le terrain, mais était "peu épais" et qu’il s’éloignerait. On leur dit de s’attendre à une approche visuelle. L'avion a franchi le PSR-2d et 41 min plus tard, les prévisionnistes notent que le brouillard était éloigné de plusieurs miles et plus loin que l'aérodrome.
Les actualisations météo reçues à 13:45, au delà du point de non retour indiquent une couche de nuages morcelés (broken) à 300ft mais sous les 360ft de altitude minimale de descente (MDA) pour l'approche aux instruments pour la piste 33. Un appel téléphonique par satellite au SOPP indique que le brouillard s’est désormais formé sur l'aéroport.
Les pilotes élaborent diverses stratégies pour l'arrivée, dont la sélection d'une approche GPS imposant une MDA (minimum descent altitude) de 360 ft, mais en raison de 1000 ft de piste inutilisable au début de la piste, ils choisissent 410 ft de MDA pour assurer un plan d’approche constant et en demandant à l'aéroport de mettre les éclairages d’approche et de piste à la luminosité maximale.
L'avion a rencontré un banc de nuages à 700 pieds d'altitude et a continué jusqu'à la MDA, mais sans références visuelles une remise des gaz est effectuée. L’avion remonte vers 5000ft et tourne en circuit d'attente pendant 2 heures en attendant que les conditions s’ améliorent comme prévues.
Un Twin Otter qui a tenté une même approche GNSS avec MDA de 360 ft 10 mn plus tard mais sans succès a dégagé sur un aérodrome à 17 km grâce à son équipement en skis. La météo a cependant continué à se détériorer, et les pilotes commencent une deuxième approche réduisant volontairement la MDA à 100 ft, altitude où ils ont encore une marge de sécurité au-dessus des obstacles autour de la piste. Les 117 passagers et les membres d'équipage ont été informés de la situation et sont assis près des issues de secours.
A la MDA de 100 pieds lors de la seconde approche, les pilotes ne voient toujours pas le sol, mais, lors de la remise des gaz qui a suivi, le deuxième captain assis sur le siège de l'observateur dans le cockpit apercoit «plusieurs marquages et des lumières » environ 50ft à droite de l'avion. L'équipage estime que ce qu'il a vu étaient les feux de la ligne centrale, ce qui signifie que l’avion était à 50 pieds à gauche de l’axe d’approche.
L'information était en quelque sorte connue du captain et des deux autres pilotes qui avaient volé sur le premier vol de la saison en piste 33 par beau temps le 3 octobre et qui avaient calibré l'approche GPS avec prise de quelques photos. A cette époque, ils avaient ainsi déterminé que l'axe de la piste était décalé vers la droite de la trajectoire de rapprochement d'environ 50 ft (15m) conséquence probable de la dérive de la glace en mouvement depuis le dernier calibrage de la saison précédente. L'approche GPS a été considérée comme valide, mais sans un nouvel étalonnage. Un accident dans la même zone a connu ce genre de dérive du sol... l'iceberg habituellement décalé par rapport à la piste, s'était déplacé...
En utilisant cette expérience et confirmant ce que le second captain avait vu et le confrontant avec les photos que le captain en formation avait pris lors de l'approche du 3 octobre, l'équipage a commencé une autre approche GPS estimant que l’axe d’approche était décalé de 15 m.
Approche corrigée vers la droite de 15 m à gauche de l’axe de piste et en atteignant 110ft le co-pilot aperçoit les feux d'approche et le captain estimant que l'avion est aligné, débraye le pilote automatique, arrondit et se pose Le 757 s’arrête, il reste 4000 ft de longueur de piste et 3000 kg de carburant, assez pour juste une approche.
Le brouillard se dissipe 90 min plus tard.
La commission dit que, compte tenu des informations météorologiques et des assurances de la SOPP, les décisions de l'équipage était «justifiées» quant à la poursuite du vol au-delà des deux points de non retour et a ensuite été laissé sans autre choix que d'atterrir dans l'Antarctique "indépendamment" de la météo. La question fondamentale de sécurité découlant de cet incident n’était pas les décisions prises par l'équipage de dépasser les PSR (points de retour possible) et de descendre l'avion sous la MDA afin de faire l’atterrissage. Une remise de gaz avec un carburant plus que minimum dans le réservoir était une option plus risquée que de tenter de se poser sous les minimas. Risque d'extinction moteur à cause de l'assiette de remise de gaz, voire panne sèche.
La question est pourquoi l'avion s’est-il retrouvé dans cette situation alors que l'équipage a appliqué les procédures normales « SOP »
En réponse, la RNZAF modifié ses procédures, en abaissant ses minimums de base des nuages pour les vols en 757 et en précisant les caractéristiques météo locales. Les procédures 757 ont également été modifiées pour exiger que le GPS approches soient validées lors des premières missions de la saison.
On peut aussi penser que faire ces vols en 757 (bimoteur et endurance possible) est peut-être réglementaire et réalisable mais peu réaliste et augmente le risque. La RNZAF a sans doute encore des C 130 quadrimoteurs et l'Australie et les US ont des C17 sans problème d'autonomie qui seraient plus adaptés à ces missions. La faisabilité en termes de risque et d'opérations aériennes avait d'ailleurs été critiquée dans les instances officielles de NZ en 2006 (page 17 papier du rapport)
Le C17 a des minimas météo de 1500ft/4800 m pour l'autre base de Mac Murdo et leur point de décision de retour sûr (PSR) est situé 20 minutes avant l'arrivée, quasi au point de début de descente.
Le C130 a désormais un PSR situé à 60/90 minutes de la destination au lieu des 150/190 minutes précédemment.
A part la 2 ème image, les autres sont extraites du rapport d'incident.
Déroulé horaire de l'incident :
Pistes de la zone (un lieu fréquenté) et où ça crashe assez régulièrement depuis 60 ans.
Vue de la "piste" quand il fait beau (hors phénomène de "white out")
Incident sérieux et intéressant sous plusieurs aspects: gestion d'un vol + approches GNSS, mais quand le sol bouge...airmanship etc.
Le Royal New Zealand Air Force (RNZAF) "40 Sqdn." exploite le 757 et Lockheed C-130 Hercules depuis sa base d’ Auckland, proposant des vols réguliers entre Christchurch et la station de recherche McMurdo en Antarctique dans le cadre d'un pool logistique commun avec les États-Unis depuis 1965.
Le B 757 a rejoint la flotte en 2010. Alors que le C-130 dispose de plusieurs options d'atterrissage à McMurdo, certaines nécessitant des skis, le 757 à ce moment de la saison est limité à des opérations vers Pegasus Field avec sa seule piste sur glace de 3000m X 150 m. Le vol de l'incident était le deuxième de trois vols réguliers pour le début de la saison d'été à McMurdo, avec trois autres vols prévus à la fin de la saison en Février et Mars.
En raison de la longueur du vol environ 4 h 45 min, il faut calculer deux points de non retour avec un scénario critique où l'avion avec ses deux moteurs doit voler bas en raison d’un problème de pressurisation (PSR-2d), et un scénario moins critique avec les deux moteurs en altitude (PSR-altitude).
L'équipage, un captain instructeur, un captain en formation, un co-pilote et un captain en second, ont décidé d'utiliser le scénario critique PSR-2d plus conservateur, qui est à 2 h 47 min de vol. La météo étant un point clé dans la décision de l'équipage qui reçoit en temps réel des prévisions météorologiques par liaison satellite fournies par le Space US Navy et le Bureau Naval Warfare Systems Command des programmes polaires (SOPP) basés à Charleston, Caroline du Sud, et au McMurdo (SOPP)
Le vol avait déjà été retardé de deux jours par le mauvais temps, et un briefing à 07h00 le 7 octobre a indiqué "la présence de brume avec quelques nuages sur le terrain", mais avec une prévision d’amélioration dans la matinée. L'avion ne pouvant embarquer le carburant nécessaire au vol aller retour retour, il lui faut refueler à Pegasus Field.
Après plusieurs briefing météo, l'avion décolle finalement à 09h57 de Christchurch et approchant de PSR-2d, l'équipage devient de plus en plus préoccupé par le brouillard dans les environs de Pegasus sur la base des prévisions météorologiques actualisées. Toutefois, le SOPP indique aux pilotes que le brouillard était éloigné puis qu’il était sur le terrain, mais était "peu épais" et qu’il s’éloignerait. On leur dit de s’attendre à une approche visuelle. L'avion a franchi le PSR-2d et 41 min plus tard, les prévisionnistes notent que le brouillard était éloigné de plusieurs miles et plus loin que l'aérodrome.
Les actualisations météo reçues à 13:45, au delà du point de non retour indiquent une couche de nuages morcelés (broken) à 300ft mais sous les 360ft de altitude minimale de descente (MDA) pour l'approche aux instruments pour la piste 33. Un appel téléphonique par satellite au SOPP indique que le brouillard s’est désormais formé sur l'aéroport.
Les pilotes élaborent diverses stratégies pour l'arrivée, dont la sélection d'une approche GPS imposant une MDA (minimum descent altitude) de 360 ft, mais en raison de 1000 ft de piste inutilisable au début de la piste, ils choisissent 410 ft de MDA pour assurer un plan d’approche constant et en demandant à l'aéroport de mettre les éclairages d’approche et de piste à la luminosité maximale.
L'avion a rencontré un banc de nuages à 700 pieds d'altitude et a continué jusqu'à la MDA, mais sans références visuelles une remise des gaz est effectuée. L’avion remonte vers 5000ft et tourne en circuit d'attente pendant 2 heures en attendant que les conditions s’ améliorent comme prévues.
Un Twin Otter qui a tenté une même approche GNSS avec MDA de 360 ft 10 mn plus tard mais sans succès a dégagé sur un aérodrome à 17 km grâce à son équipement en skis. La météo a cependant continué à se détériorer, et les pilotes commencent une deuxième approche réduisant volontairement la MDA à 100 ft, altitude où ils ont encore une marge de sécurité au-dessus des obstacles autour de la piste. Les 117 passagers et les membres d'équipage ont été informés de la situation et sont assis près des issues de secours.
A la MDA de 100 pieds lors de la seconde approche, les pilotes ne voient toujours pas le sol, mais, lors de la remise des gaz qui a suivi, le deuxième captain assis sur le siège de l'observateur dans le cockpit apercoit «plusieurs marquages et des lumières » environ 50ft à droite de l'avion. L'équipage estime que ce qu'il a vu étaient les feux de la ligne centrale, ce qui signifie que l’avion était à 50 pieds à gauche de l’axe d’approche.
L'information était en quelque sorte connue du captain et des deux autres pilotes qui avaient volé sur le premier vol de la saison en piste 33 par beau temps le 3 octobre et qui avaient calibré l'approche GPS avec prise de quelques photos. A cette époque, ils avaient ainsi déterminé que l'axe de la piste était décalé vers la droite de la trajectoire de rapprochement d'environ 50 ft (15m) conséquence probable de la dérive de la glace en mouvement depuis le dernier calibrage de la saison précédente. L'approche GPS a été considérée comme valide, mais sans un nouvel étalonnage. Un accident dans la même zone a connu ce genre de dérive du sol... l'iceberg habituellement décalé par rapport à la piste, s'était déplacé...
En utilisant cette expérience et confirmant ce que le second captain avait vu et le confrontant avec les photos que le captain en formation avait pris lors de l'approche du 3 octobre, l'équipage a commencé une autre approche GPS estimant que l’axe d’approche était décalé de 15 m.
Approche corrigée vers la droite de 15 m à gauche de l’axe de piste et en atteignant 110ft le co-pilot aperçoit les feux d'approche et le captain estimant que l'avion est aligné, débraye le pilote automatique, arrondit et se pose Le 757 s’arrête, il reste 4000 ft de longueur de piste et 3000 kg de carburant, assez pour juste une approche.
Le brouillard se dissipe 90 min plus tard.
La commission dit que, compte tenu des informations météorologiques et des assurances de la SOPP, les décisions de l'équipage était «justifiées» quant à la poursuite du vol au-delà des deux points de non retour et a ensuite été laissé sans autre choix que d'atterrir dans l'Antarctique "indépendamment" de la météo. La question fondamentale de sécurité découlant de cet incident n’était pas les décisions prises par l'équipage de dépasser les PSR (points de retour possible) et de descendre l'avion sous la MDA afin de faire l’atterrissage. Une remise de gaz avec un carburant plus que minimum dans le réservoir était une option plus risquée que de tenter de se poser sous les minimas. Risque d'extinction moteur à cause de l'assiette de remise de gaz, voire panne sèche.
La question est pourquoi l'avion s’est-il retrouvé dans cette situation alors que l'équipage a appliqué les procédures normales « SOP »
En réponse, la RNZAF modifié ses procédures, en abaissant ses minimums de base des nuages pour les vols en 757 et en précisant les caractéristiques météo locales. Les procédures 757 ont également été modifiées pour exiger que le GPS approches soient validées lors des premières missions de la saison.
On peut aussi penser que faire ces vols en 757 (bimoteur et endurance possible) est peut-être réglementaire et réalisable mais peu réaliste et augmente le risque. La RNZAF a sans doute encore des C 130 quadrimoteurs et l'Australie et les US ont des C17 sans problème d'autonomie qui seraient plus adaptés à ces missions. La faisabilité en termes de risque et d'opérations aériennes avait d'ailleurs été critiquée dans les instances officielles de NZ en 2006 (page 17 papier du rapport)
Le C17 a des minimas météo de 1500ft/4800 m pour l'autre base de Mac Murdo et leur point de décision de retour sûr (PSR) est situé 20 minutes avant l'arrivée, quasi au point de début de descente.
Le C130 a désormais un PSR situé à 60/90 minutes de la destination au lieu des 150/190 minutes précédemment.
A part la 2 ème image, les autres sont extraites du rapport d'incident.
Déroulé horaire de l'incident :
Pistes de la zone (un lieu fréquenté) et où ça crashe assez régulièrement depuis 60 ans.
Vue de la "piste" quand il fait beau (hors phénomène de "white out")