par eolien Lun 18 Avr 2016 - 16:13
Tiré des Echos :
La bataille pour la succession d'Alexandre de Juniac à la tête d'Air France-KLM est engagée
David Barroux François Vidal Bruno Trévidic
Si deux candidats font figure de favoris, l'issue de la bataille reste très incertaine.
Deux semaines après l'annonce du prochain départ d'Alexandre de Juniac, le mercato pour le poste de PDG d'Air France-KLM bat son plein. Afin de pouvoir présenter un candidat à la prochaine assemblée générale du groupe, le 19 mai, le comité de nomination devrait proposer au moins un nom au conseil d'administration du 3 mai. Mais au vu de la complexité du processus et des tensions qu'il suscite, un report de la décision au-delà de l'assemblée générale n'est pas à exclure.
Plusieurs listes de candidats potentiels ont été dressées. Au sein d'Air France-KLM, notamment par Alexandre de Juniac lui-même, qui reste PDG du groupe jusqu'à fin juillet. Mais aussi à l'Agence des participations de l'Etat (APE), en charge des 17,5 % d'Air France-KLM détenus par l'Etat. Ainsi qu'au sommet de l'Etat lui-même. Au moins deux cabinets de chasseurs de têtes - Spencer Stuart et Progress - ont également été mandatés.
Approchés, certains hommes d'affaires ont déjà répondu par la négative. C'est le cas de Thierry Antinori, l'actuel numéro deux d'Emirates, et de Fabrice Brégier, le PDG d'Airbus. Guillaume Pepy, le PDG de la SNCF, qui avait été candidat en 2015, lors du renouvellement du mandat d'Alexandre de Juniac, aurait également refusé d'être auditionné. D'autres noms ont circulé, comme ceux de Marwan Lahoud, le directeur de la stratégie d'Airbus Group, de Florence Parly, ancienne patronne de la branche cargo d'Air France, passée en 2014 à la SNCF, ou de Nicolas Dufourcq, de bpifrance…
Selon nos informations, deux candidats font figure de favoris, à l'issue des premières auditions : Jean-François Cirelli, cinquante-sept ans, ancien PDG de Gaz de France et ex-DG de GDF-Suez, président de la branche française du fonds d'investissement BlackRock, et Jean-Marc Janaillac, soixante-trois ans, PDG du groupe de transports publics Transdev.
L'un et l'autre cocheraient toutes les cases requises. A savoir être français et extérieur au groupe Air France-KLM, tout en ayant l'expérience de la conduite d'une grande entreprise et un savoir-faire en matière de dialogue social. Tous deux seraient aussi susceptibles d'accepter un poste très exposé, pour une rémunération inférieure de moitié à la moyenne des PDG de grandes entreprises et bien loin des millions touchés par les autres présidents de compagnies aériennes. Soit un salaire fixe de 600.000 euros par an, complété par une part variable en fonction des objectifs atteints pouvant aller jusqu'à 100 % du fixe.
Jean-François Cirelli aurait pour lui sa réputation d'homme de dialogue, sachant tisser des liens avec les syndicats. Cet énarque bénéficie aussi de solides relations dans le monde des affaires et dans la haute fonction publique. Cependant, l'ancien des cabinets de Jacques Chirac puis de Jean-Pierre Raffarin a le relatif handicap d'être catalogué à droite, même si, fort de sa proximité avec Jacques Chirac, il peut revendiquer des mêmes attaches corréziennes que François Hollande.
Jean-Marc Janaillac peut, quant à lui, se prévaloir du redressement de Transdev et de sa gestion de la crise de la SNCM. Il possède même une connaissance du transport aérien, chez AOM, dont il fut le numéro deux de 1997 à 2000. Lui aussi peut faire état d'un bon exercice du dialogue social dans un secteur, les transports publics, très exigeant en la matière. Il est aussi connu pour avoir partagé les bancs de HEC et de l'ENA avec François Hollande. Même s'il s'est bien gardé d'afficher ses liens avec le président, sa nomination présenterait un risque politique pour l'Elysée. Certains considèrent également son âge comme un handicap, même si les statuts d'Air France-KLM permettent au PDG d'aller jusqu'à soixante-dix ans.
Une candidate à Matignon
L'émergence d'un troisième candidat n'est donc pas exclue. En fin de semaine dernière, une candidature de la directrice de cabinet de Manuel Valls, Véronique Bédague, semblait ainsi sérieusement envisagée. Enarque passée par le FMI, le cabinet de Laurent Fabius à Bercy et le secrétariat général de la Mairie de Paris sous Delanoë, Véronique Bédague aurait pu compter sur la volonté du président de féminiser la direction des grandes entreprises. Cependant, un parachutage de la directrice de cabinet du Premier ministre à un an de l'élection présidentielle semble politiquement difficile à défendre. « Elle a toutes les qualités en termes d'expérience et de compétences, mais sa candidature n'est pas d'actualité », jure-t-on à Matignon.
D'autant qu'au sein d'Air France-KLM, certains représentants du personnel militent déjà pour une solution interne, qui consisterait à choisir l'actuel PDG d'Air France, Frédéric Gagey, ou celui de HOP!, Lionel Guérin. Les deux hommes ont l'avantage de connaître l'entreprise et d'être connus des salariés. Frédéric Gagey est également servi par une bonne connaissance de KLM, dont il fut le directeur financier pendant plusieurs années. Mais il est associé à l'échec des négociations avec les représentants des pilotes d'Air France sur le nouveau plan stratégique.