Dernière nouvelles des Echos :
Air France : bras de fer entre les pilotes et la direction sur l'avenir de Transavia
Bruno Trévidic
Le principal syndicat de pilotes d'Air France, le SNPL, appelle à faire grève du 15 au 22 septembre. Le SNPL veut des pilotes sous contrat Air France sur les avions de la filiale low cost Transavia.
La trêve estivale est bel et bien finie chez Air France. Comme il en avait brandi la menace en juillet, le principal syndicat de pilotes d'Air France, le SNPL, a annoncé hier matin le dépôt d'un préavis de grève reconductible pour la période du 15 au 22 septembre inclus. Le syndicat, qui représente plus de 70 % des pilotes d'Air France, entend ainsi peser sur la réorganisation de l'activité court et moyen-courriers, qui doit faire l'objet de premières annonces lors du comité d'entreprise du 4 septembre, ainsi que lors de la journée investisseurs du 11 septembre.
Cependant, cette réorganisation a connu un coup d'accélérateur inattendu, hier matin, avec l'annonce de la démission de la responsable de l'activité point à point d'Air France, Florence Parly, et la nomination de Lionel Guérin, le PDG de la marque régionale Hop!, comme chef de projet de la « nouvelle unité regroupant l'ensemble de l'activité point à point d'Air France et de Hop! ».
Air France officialise ainsi sa décision de placer sous la direction du patron de Hop! tous les vols au départ d'Orly et des escales de province, ne participant pas à l'alimentation du hub de Roissy-CDG, comme le proposait le rapport remis en juin dernier par le même Lionel Guérin.
Les détails de cette réorganisation, qui doit permettre de mieux coller aux besoins du marché en combinant les Airbus A320 d'Air France avec les avions régionaux de Hop!, seront présentés fin octobre. Elle pourrait se traduire par un effacement quasi complet de la marque Air France à Orly, au profit de Hop! Toutefois, les personnels d'Air France et les A320 placés sous la houlette de Lionel Guérin conserveront leur statut Air France. Ce n'est donc pas un problème pour le SNPL AF, qui a même pris position en faveur des conclusions du rapport Guérin.
Passer d'une marque à l'autre
Le véritable point de désaccord porte sur le second pilier du plan moyen-courrier : le développement de Transavia France, la filiale low cost d'Air France. Ou plutôt sur ses modalités. Si syndicat et direction s'accordent sur la nécessité d'accélérer le développement de Transavia, leurs vues divergent sur les moyens d'y parvenir. Pour le SNPL, les pilotes de Transavia, comme tous ceux aux commandes d'un avion de plus de 100 places, doivent être des pilotes d'Air France. Selon le SNPL, des pilotes d'Air France placés dans les mêmes conditions d'exploitation que ceux de Transavia ne coûteraient pas plus cher et offriraient « l'agilité et la réactivité nécessaire », pour pouvoir passer d'une marque à l'autre, « en fonction des besoins du client ».
Mais ça n'est pas du tout l'avis du Pdg d'Air France, Frédéric Gagey, pour qui le statut des pilotes d'Air France n'est pas compatible avec le modèle low cost de Transavia. Selon les chiffres de la direction, le coût à l'heure de vol d'un pilote d'Air France serait de 40 % à 70 % plus élevé que celui d'un pilote sous contrat Transavia, lui-même supérieur de 20 % à celui d'easyJet. Par ailleurs, les pilotes d'Air France sont qualifiés sur des A320 alors que la flotte de Transavia est composé de 14 Boeing 737. Le groupe en a même commandé 7 supplémentaires. « Pas question de plomber le développement de Transavia en y important les coûts d'Air France », explique-t-on chez Air France, où l'on se dit prêt à renoncer à développer Transavia, plutôt que de céder.
Sans le feu vert du SNPL, Transavia France ne pourrait en effet pas dépasser la limite de 14 appareils fixée en 2007, lors de sa création. Compte tenu des sombres perspectives du réseau traditionnel d'Air France, rongé par les low cost, le TGV et même le covoiturage, Air France se priverait ainsi de la seule source de croissance possible en court et moyen-courriers : la clientèle loisirs. Mais les pilotes, dont la rémunération et l'avancement dépendent de la croissance du trafic, auraient aussi beaucoup à perdre.