par jullienaline Sam 18 Juil 2009 - 21:39
Bonsoir à tous,
Quelle crédibilité accorder à Eurockopit ?
Ma question ne porte pas sur leur analyse de la trajectoire d’AF447, mais sur la manière de la présenter.
Par exemple :
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le Directeur Général d’Air France Pierre-Henri Gourgeon vient de vous y aider par ses déclarations dans le journal Le Figaro du 8 juillet 2009 : «Le commandant de bord du vol Sao Paulo - Paris, passé peu après le vol AF 447 dans le Pot au Noir, a raconté avoir traversé une première zone orageuse qui n'avait pas été détectée par son radar et du coup en avoir évité une beaucoup plus importante en renforçant manuellement la sensibilité de son radar. Le vol AF 447 n'a peut être pas eu la chance d'avoir ce premier coup de semonce et n'a peut-être pas pu éviter une zone orageuse très active. Ce témoignage va nous inciter à revoir la façon d'utiliser les radars. Qu'il s'agisse ou non de la cause de la disparition du vol AF 447, on doit étudier tous les facteurs et faire évoluer les processus et les règles.»
Comprenez : les pilotes du vol AF 447 Rio - Paris ne savaient pas utiliser leur radar et «n’ont pas eu la chance» de ne pas se tuer. Air France va former les imbéciles de pilotes qui restent pour qu’ils sachent enfin utiliser les beaux radars qu’on leur prête. Quant à la déclaration «qu'il s'agisse ou non de la cause de la disparition du vol AF 447, on doit étudier tous les facteurs et faire évoluer les processus et les règles», il faut reconnaître que le discours de Monsieur Gourgeon n’est pas le même lorsqu’on lui parle des sondes Pitot... Puisque, c'est bien connu, les sondes Pitot ne sont pas, ne peuvent pas être et ont l'interdiction d'être la cause de la disparition du vol AF 447.
Voilà, l’affaire est réglée, l’avion s’est écrasé parce que, le BEA et Air France le disent d’une même voix..., l’avion est resté sur sa route du plan de vol tout droit dans les "très gros orages gigantesques" décrits par Monsieur Feldzer.
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La capacité d’Eurocockpit à être partisan et corporatiste est patente ! Il déforme les propos de M. Gourgeon pour alimenter leur point de vue plus que critiquable. Il est ainsi, pour moi, évident qu’il pratique de la même façon que celle qu’il reproche à AF, Airbus et au BEA : "ce n’est pas de notre faute mais celle des autres". Je m’explique :
Je pense qu’un point qui ne peut que tous nous rapprocher et sur lequel nous ne pouvons qu’être d’accord est que ce malheureux accident est du à un enchaînement de causes. Dire, écrire que tout est du à la panne simultanée des 3 pitots et seulement à eux est une ineptie. Cette panne est prévue et une procédure particulière doit être appliquée dans cette situation par les pilotes. Cette procédure est connue est doit être appliquée de mémoire. Encore une fois, cette panne a, dans le passé, déjà eu lieu, a provoqué des situations difficiles mais n’a jamais eu pour conséquence la perte de l’appareil et encore moins celle de tous ces occupants. Pourquoi ces équipages ont réussi là où celui d’AF447 a échoué ? C’est cela la bonne question. Et je ne remets pas en cause la valeur de l’équipage d’AF447, mais je m’interroge, je recherche (avec le peu de moyens à ma disposition) la ou les causes qui l’a empêché de maintenir cet appareil en vol.
Alors, Il faut vraiment être partisan et corporatiste pour continuer à clamer que la seule et unique cause est la panne simultanée des trois pitots !
Ce qui est sur est que des vitesses incohérentes ont été mesurées. Une forte présomption porte sur la panne des trois pitots pour expliquer ces mesures incohérentes. Toujours est-il, qu’à elle seule, si elle est avérée, cette cause ne peut expliquer entièrement l’accident : un ou plusieurs facteurs supplémentaires ont empêché l’équipage de maîtriser l’avion.
Manifestement (fait établi), le PA s’est déconnecté, rendant la main aux pilotes (procédure automatique lorsque des vitesses incohérentes apparaissent). Ils ont du reprendre la main de nuit, dans une situation météo difficile et avec une certaine soudaineté (quelques dizaines de secondes d’après les messages ACARS). Je m’imagine à leur place, mais avec mes moyens ! Je suis assis au volant de ma voiture familiale sur l’autoroute, de nuit et régulateur de vitesse enclenché. La routine en somme. Quinze secondes plus tard, sans prévenir, je suis au volant d’une F1 lancée à pleine vitesse, de nuit, dans la montée de l’Eau-Rouge du circuit de Spa-Francorchamps (cf Senna et Schumacher) et sous des trombes d’eau. Que croyez-vous qu’il puisse arriver ?
Avec cette image, ce que je veux mettre en exergue est premièrement le fait que les pilotes ne sont pas infaillibles, quelles que soient leurs grandes qualités et quel que soit l'entraînement qu’ils ont reçu. Deuxièmement, comme je l’ai déjà écrit, le fait que l’automatisme redonne la main dans une situation difficile et devenant même rapidement très critique, sans autre forme de procès, dans un déluge d’alarmes sonores, visuelles et qui n’ont pas forcément de cohérence entre elles.
En cela, je dépasse l’éventuelle panne des trois pitots, pour stigmatiser le fait que le système se défausse dans une situation plus que critique alors que les pilotes sont installé dans un certain confort du vol de croisière (même si, sur leur route, quelques cunimbs sont présents) et n’apporte aucune aide intelligente comme on est en droit de l’attendre de ce genre de système.
Alors, ne vaudrait-il pas mieux que le système applique de lui-même la procédure prévue lorsque les vitesses mesurées par les différents capteurs sont incohérentes ? Et ensuite en rende compte aux pilotes. Pas de redondance dans cette procédure mais simplement accepter que les automatismes peuvent encore plus replacer les pilotes C’est, bien sur, pousser encore plus loin l’automatisation et accepter que les prérogatives des pilotes soient un peu plus rognées et accepter pleinement leur faillibilité.
Pour toutes ces raisons, je considère que Eurockpit est partisan et corporatiste. Il occulte tous ces points et rejette en bloc toute défaillance des pilotes.
Il pratique de la même façon que celle qu’il reproche au BEA : mais non les pilotes ne sont pas fautifs...
Il pratique de la même façon que celle qu’il reproche à AF : en faisant tout pour dédouaner les pilotes, il semble allumer les contre-feux dans l’optique du procès plus que certain.
Il pratique de la même façon que celle qu’il reproche à Airbus : il n’y a aucune raison de s’interroger sur la place/rôle du pilote dans la chaine de pilotage d’un appareil moderne.
Pour terminer, une légèreté. Cela me rappelle qu’en France il y a une équipe nationale de football et qu’il y a 60 millions de sélectionneurs qui détiennent tous la vérité...
Amicalement