C'est le grand problème de cet accident : il suffit d'isoler un élément pour démontrer que le pilote n'a pas eu les réactions qu'il aurait fallu avoir.
Il suffit de dire
"Regardez, le pilote ne fait pas ce qu'il fallait faire" sans mettre en face le désordre instrumental et technique qui justifie ces erreurs.
Toute la difficulté est de placer cet évènement dans le contexte global.
Cette façon d'analyser l'accident est celle retenue par les expertises. Ainsi il devient aisé d'accuser les pilotes et ce faisant de disculper l'avion.
• L'avion a très rapidement perdue son énergie (échangée contre de la prise d'altitude).
• Si vous placez votre Sidestick comme l'a fait le copilote aux commandes, le résultat ne se fait pas attendre, un avion ne demandant qu'à descendre ...
Pourtant celui-ci a réagi mollement. Si procès il y a je parie que seront produits des témoignages de pilotes qui dans ces situations de lois dégradées sur Airbus se sont plaints d'une "mollesse" de l'avion aux ordres à piquer : gains modifiés, facteur de charge se mélangeant les pinceaux entre demande du pilote et turbulences, faible efficacité de la gouverne de profondeur masquée par le PHR en évolution vers plein cabrer ?...)
Allez dans un aéro-club, demandez au pilote de pousser sur son manche, un petit peu, juste de quelques degrés : vous aurez vite compris ! Entre haut le coeur et bosse sur le crâne !
Autre fait important : n'oubliez pas qu'à l'approche du décrochage, le SeedTrend (flèche verte ci-dessous) indiquait une nette accélération alors que la vitesse s'effondrait.
Notez la situation : en bas à gauche
SPD LIM rouge : perte des vitesses. Des croix ambres autour de l'horizon artificiel, en mémoire fraîche le souvenir que l'avion est descendu avec la poussée à 80 % et qu'il a donc accéléré vers la survitesse MMO, le binz dans les commandes de vol dont les réactions sont inhabituelles, des alarmes de tous les côtés ...
"Le SpeedTrend me dit que l'avion accélère, si je maintiens le Sidestick à piquer j'aggrave la situation ... donc ?..."Le BEA s'en tape, les experts glissent dessus, les pilotes de ligne en tiennent compte. Ils le font tous les jours, le SpeedTrend est très fiable et très utile. Ceux de l'AF447 ont dû être perturbés par cette information.
Totalement fausse, mais ça ils ne pouvaient pas le savoir.
S'il y a "non lieu" le grand public restera convaincu que l'accident est imputable aux pilotes et les "anomalies" de l'avion resteront ignorées ... jusqu'au prochain incident ou accident.
S'il y a procès, Air France, les syndicats de pilotes, les familles des victimes pourront poser sur le devant de la scène d'autres arguments ... plus techniques et incontestables.