par eolien Mer 22 Oct 2014 - 11:40
Bonjour, je soumets à votre appréciation ce thème :
La différence entre la vraie vie d’un évènement et sa reconstitution.
Supposons deux pilotes placés pour traiter le même problème.
• Le pilote Alpha, aux commandes d’un A330 - 200, en croisière, de nuit, dans un environnement hostile, météo difficile à l’extérieur, lorsque reprenant le pilotage en manuel suite à une panne du pilote automatique, ses instruments lui indiquent que son avion descend et s’incline à droite.
Au même moment de nombreuses pannes se déclarent dans le cockpit, alarmes visuelles et sonores.
Son Flight Director lui indique aussitôt une assiette à cabrer, cohérente avec la situation lue sur ses instruments, qu’il suit en tirant légèrement sur son Sidestick, et dans le même temps, pour stopper l’inclinaison croissante il donne un coup de poignet à gauche, input qui doit ramener les ailes à l’horizontale.
Si l’avion a bien correctement relevé son nez, par contre il a sèchement basculé de l’autre côté. Surpris, le pilote contre par un autre input à droite qui entraine une nouvelle rotation des ailes toujours exagérée.
Le Flight Director tombe en panne et les barres de tendance disparaissent.
D’un côté il doit gérer l’assiette avec un Sidestick qui travaille dans un certain dosage, de l’autre il doit essayer de contrôler l’inclinaison avec une commande qui travaille dans un dosage doublé.
Pour ce faire, il doit jouer autour de la position centrale, le neutre de son Sidestick. S’il perd cette référence quasiment insensible, alors il perdra le contrôle de l’assiette.
Il ne sait pas, il ne saura jamais qu’à son insu les lois de pilotage ont doublé le taux de rotation sur un axe, sur un axe seulement et qu’il aurait fallu pour s’y adapter modérer de moitié ses actions sur un axe, un axe seulement.
L’ECAM annonce plusieurs pannes, dont une concerne les commandes de vol, et une autre un blocage de la poussée des moteurs.
Un message lui rappelle les limitations en survitesse.
• Le pilote Béta, aux commandes d’un A340 doit explorer le pilotage de la loi directe, Direct Law, sur l’axe de roulis autour duquel se balancent les ailes.
On l’a d’abord entrainé au simulateur, où pendant plusieurs séances il s’est contraint à modérer ses inputs de droite et de gauche.
Puis le grand jour est arrivé, on l’a grimpé à haute altitude, de jour et par beau temps, on l’a installé sur un siège pilote d’un A 340, car l’A340 n’est pas sujet à la faille altimétrique comme l’A330 - 200 du pilote Alpha.
.
Lorsqu’il a été prêt on lui a dit qu’on le basculait en Direct Law en roulis.
Dans le silence seulement distrait par le chuintement de la climatisation, l’avion, bien stable en croisière n’a pas bougé, son altimètre l’indiquant en palier stabilisé, le pilote n’a donc eu aucune raison de tirer sur son Sidestick pour revenir à son altitude de croisière, aucun instrument n’ayant indiqué quoique ce soit qui n’était pas prévu, programmé, planifié.
Reproduisant ses entrainements au simulateur il a délicatement pressé le Sidestick vers la gauche et l’avion s’est gentiment incliné. De suite il a replacé son Sidestick au neutre puis très légèrement à gauche et l’avion est revenu les ailes à plat.
Il a refait la manoeuvre et on a remis l’avion en loi normale, Normal Law.
De retour au sol le pilote Béta l’a déclaré : "Le pilotage en Direct Law est aisé et se contrôle facilement."
C’est pour ça que le pilote Béta est un expert.
Ma fille, qui n’est pas pilote-experte mais qui a de la répartie et du vocabulaire, dirait « C’est du foutage de gueule ! »